Lorsque le Comité national des écrivains décide, en 1942, de créer une maison d'édition clandestine, les fameuses Editions de Minuit, "Le Silence de la mer" est le premier titre à être publié.
Une vingtaine d'autres suivront jusqu'à la Libération, mais c'est le texte inaugural de Vercors qui connaît le plus grand retentissement. Cette sobre histoire, où une famille française s'oppose par le silence à l'officier allemand qu'elle a été obligée de loger, est un plaidoyer implacable contre la barbarie nazie. Sous la calme surface des eaux, c'est la terrible "mêlée des bêtes dans la mer" qui se trouve soudainement révélée, et toute "la vie sous-marine des sentiments cachés, des désirs et des pensées qui se nient et qui luttent."
Les récits qui accompagnent "Le Silence de la mer" ont une portée peut-être moins complexe mais tout aussi forte.
Note par moi ajoutée à ce quatrième de couverture: je crois que Jean Bruller, Vercors donc, a été invité par Bernard Pivot à "Apostrophes" vers 1989 ou 1990.
Il est à relever que "Le Silence de la mer" est dédié "A la mémoire de Saint-Paul-Roux, poète assassiné".
Extrait 1, les premiers mots:
"Il fut précédé par un grand déploiement d'appareil militaire."
Extrait 2:
"Je terminai silencieusement ma pipe. Je toussai un peu et je dis: "C'est peut-être inhumain de lui refuser l'obole d'un seul mot." Ma nièce leva son visage. Elle haussait très haut les sourcils, sur des yeux brillants et indignés. Je me sentis presque un peu rougir."
Extrait 3:
"Il était devant les rayons de la bibliothèque. Ses doigts suivaient les reliures d'une caresse légère. (Il=l'Offizier, réd). "Balzac, Barrès, Baudelaire, Beaumarchais, Boileau, Buffon... Châteaubriand, Corneille, Descartes, Fénelon, Flaubert... La Fontaine, France, Gautier, Hugo... Quel appel !" dit-il avec un rire léger et hochant la tête. "Et je n'en suis qu'à la lettre H ! ... Ni Molière, ni Rabelais, ni Racine, ni Pascal, ni Stendhal, ni Voltaire, ni Montaigne, ni tous les autres !..." Il continuait de glisser lentement le long des livres, et de temps en temps il laissait échapper un imperceptible "Ha!" quand, je suppose, il lisait un nom auquel il ne songeait pas."
Ce volume de poche réunit, outre "Le Silence de la Mer", "Ce jour-là", "Le songe", "L'impuissance", "Le Cheval et la mort", "L'Imprimerie de Verdun", et "La marche à l'étoile". Ce dernier récit, "La Marche à l'étoile", raconte le destin du Tchèque Thomas Muriz qui n'a cessé de rêver à la France et qui, à la fin de sa vie, en 1942, se voit livré aux nazis par des gendarmes français en raison de son "sang juif".
Précision: ce livre a été çà et là annoté au crayon par je ne sais qui au juste.
P. 170 dédicaces multiples à des "morts pour la France" et à "Etienne, soldat de Libye".