Ce n'est pas un ouvrage de musicologie, c'est bien un roman (ce n'est qu'un roman, un ouvrage de fiction).
On n'y apprend pas grand'chose sur Carlos Kleiber (chef autrichien, 1930-2004) qui de sa vie n'a d'ailleurs jamais donné d'interview enregistrée ; on accompagne un journaliste français questionnant un violoniste qui l'a bien connu.

On regarde l'auteur, on l'écoute, on se rappelle ce qu'on a déjà lu ; on juxtapose : quelque chose cloche.

C'est très bien écrit, vraiment. Maîtrisé. Du gars qui sait manier une histoire. Fluide, rapide, puissant, nerveux, élégant.
Mais ça ne ressemble en rien à l'auteur qu'on nous dit.
Ça ne ressemble en rien à ses précédents récits.
Ça ne ressemble en rien au personnage public, à son phrasé, son style, sa componction, ses périphrases de haut fonctionnaire, ses prudences de diplomate, ses sinuosités d'appareil.

Au contraire c'est viril, tonique, acide, vif, direct. Il y a un rythme, une urgence, un côté sale gosse, hors des lignes.

Aussi, je pose une hypothèse hardie :
soit notre ministre est totalement schizophrène ;
soit ce n'est pas lui qui écrit ses livres.

Gallimard L'infini 2012, 120 p.