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Aussi imagina-t-elle, N., et son compagnon de jeux habituel M., un Merveilleux voyage de Nils Schweizer à travers la Suisse. Assis à califourchon sur un gypaète géant, derrière N., son amie d’enfance, à eux deux ils décollèrent du village de Chancy sous les yeux ébaubis des habitant.e.s médusé.e.s D’en haut, ils eurent une vue large sur le serpent luisant d’humidité du Rhône qui s’écoulait derrière eux puisque leur vol le prenait à contre-courant. Là, le barrage de Verbois ! lança *** (Enfant, n’était-il pas allé en excursion sur le Bateau du Rhône, tandis qu’un guide racontait dans la sono tout ce qu’il y avait à voir ?) L’Ile, le pont du Mont-Blanc, la rade s’offraient à présent à leur regard. République XII, le grand gypaète barbu (a-t-on jamais vu un oiseau se raser ?) leur désigna Yvoire d’un mouvement latéral du bec. Qu’y a-t-il à Yvoire ? – Des éléphants, répondit Nils (son prénom commençant par N comme celui de son amie) On voyait en effet un troupeau de pachydermes brouter des arpents du 74. Survoler des éléphants en montgolfière au Kenya, cela s’est vu, mais dans le bassin lémanique… Le gypaète gagna la Côte, puis survola Lausanne, fier comme Artaban ou comme si son vol féerique avait été promu sport olympique par la ville du CIO. Les autos sur la route de Lucens avaient l’air de voitures miniatures. Des éclats de métal jaillirent, reflétés par le soleil : on se battait dans les Arènes d’Avenches. – Eh, de vrais gladiateurs ? – C’est juste une performance, expliqua le vautour-aigle (gypaète ça veut dire cela) Un chien aboyait pour qu’on le laissât entrer dans l’arène. Cave canem, avertit un spectateur. Je le tiens fermement en laisse, ajouta le propriétaire du canis vulgaris. Des tas de gens roupillaient dans des transats : - L’endroit s’appelle Villarepos, alors on s’y repose, conclurent les deux passagers aériens. La Suisse n’a pas de littoral maritime mais des transats, on en trouve. Quel est ce X géant dessiné sur le sol suisse ? C’est la croix ferroviaire de Kerzers, répondit République XII. Ils chaussèrent leurs lunettes X magiques, de quoi voir à travers les murs et le sol de la patrie : Ah ! Des ossements ! Près de Morat ils virent en transparence comme si la Suisse était une plaque de verre (un plafond de verre pour certaines habitantes, on le savait) des restes de combattants du duc Charles le Téméraire trucidés en 1476. Hé bin oui, tout voir n’est pas forcément joyeux. Un vol en piqué juste pour frôler le Palais Fédéral fit fuir des milliers de pigeons bernois. Les ours virent quelque chose mais ne bronchèrent pas. Ensuite… Viola Amherd intriguée saisit une paire de jumelles (il y en avait une dans une armoire de son bureau, souvenir d’un cours d’identification d’avions) Constata que l’aéronef n’était pas dangereux et sourit : on en fera peut-être un ambassadeur de bonne volonté de la Suisse…

Il ne t'est jamais donné de rêve sans le pouvoir de le réaliser. (Richard Bach)


Rue Tolstoï.


Le merveilleux voyage de Nathalie et Nils Schweizer à travers l’Helvétie les mena – sur le dos du gypaète République XII – au-dessus de l’Entlebuch. Ils distinguèrent des formes qui couraient et un intervenant qui tenait une sorte de pancarte. – Des joueurs de hornuss ! Nath s’empara des jumelles : En fait c’est la ligue féminine de hornuss qui joue… L’oiseau hybride vira sur l’aile et survola Lucerne, accomplit une descente surprise jusqu’à quelques mètres seulement au-dessus du Kappellbrücke, des dizaines de personnes prirent des clichés, osant à peine y croire… « C’était comme dans une histoire pour enfants, je ne sais plus laquelle, celle qui se passe en Suède… » témoigna une passante au micro de la radio locale (mais les deux passagers fabuleux ne l’entendirent pas). « Ronja fille des brigands ? » - « Non, le voyage de Helga Nilsson ou quelque chose comme cela… » Ensuite, le spectacle les saisit d’ébahissement. Il y avait des montagnes. Un lac. Turquoise sous le soleil, le lac paraissait lécher les montagnes, s’insinuer entre elles comme un chat flexible se frottant à tous les murs et à tous les arbres. Tel se montra le Lac des Quatre-Cantons. A la longue-vue, Nils visa le Rocher de Schiller, à Brunnen, et un embarcadère, et même, dans la ligne de mire se révéla la trouée de l’Urnersee, les autos sur l’Axenstrasse eurent l’air de souris dans une sculpture de Jean Tinguely. Ils tournèrent plusieurs fois au-dessus de Flüelen et même de Brunnen, suscitant des oh et des ah d’indigènes et de touristes… Certains ratèrent le bus pour Altdorf.