Vacances, 7.

Attention, sujet clivant.
Ce livre m'a fâché avec la moitié de ma famille.
Ce n'est pas que l'auteur est sulfureux ; pour certaines personnes son seul nom est juste imprononçable.

En cause, son histoire avec la fille adoptive de l'actrice Mia Farrow :

Quand leur vies se rejoignent en 1979 -ils ne se marieront ni ne vivront ensemble-, Mia a sept enfants, dont trois adoptés, parmi lesquels Soon Yi, une sud-coréenne de huit ans.
En 1992 commence une idylle entre cette dernière, 22 ans, et Allen.
La pilule passe mal : Farrow s'en étrangle (dans l'affaire elle perd à la fois son compagnon, son employeur et son enfant), les tabloïds se régalent, les ligues de vertu trouvent ça limite.
Plainte, enquête, interminable, qui finalement dédouane le cinéaste. De fait, Soon Yi et lui vivent ensemble depuis maintenant 25 ans.

Sur un quart du livre environ il nous délivre sa version : en gros, Farrow est une allumée de première.
Ses arguments sont convaincants.*

Pour le reste, on le suit depuis ses premières piges d'humoriste anonyme pour la télévision, jusqu'à son éclosion, la naissance de son style, sa reconnaissance, ses 54 films -il glisse un mot sur chacun-, qu'il serait erroné de limiter à du cinéma d'auteur : son plus grand succès mondial, Midnight in Paris (2011), a rapporté dix fois son budget.

Au-delà de son genre monographie sur Manhattan, le cinéma et le show business depuis 1950, le texte est émaillé de mille anecdotes ou aphorismes savoureux.

Sur Diane Keaton sa troisième femme :
"Elle possédait sans conteste un grand sens artistique. On s'en aperçoit à la façon dont elle s'habille : elle peut lancer une mode si les gens pensent que ça fait chic d'épingler une patte de singe mort au revers d'une veste."

Sur l'académie des Oscars :
"Deux semaines après la remise des prix, je reçois un coup de fil courroucé de l'académie : "Pourquoi ne précisez-vous pas dans vos publicités qu'Annie Hall a reçu quatre oscars ?" Tout cela m'étant indifférent au plus haut point, j'avais répondu que, s'ils y tenaient, j'acceptais qu'ils y fassent référence. Je ne voulais pas en faire une provocation, mais ma réaction fut prise comme telle."
(J'adore)

Sur ce livre en lui-même :
"Je n'ai pas parlé des détails techniques relatifs à la réalisation de mes films parce que je trouve ça mortel, et que je ne m'y connais pas plus en éclairage ou en prise de vues aujourd'hui qu'à mes débuts. Je sais bien qu'il faut enlever le cache protégeant l'objectif de la caméra avant de filmer, mais là s'arrêtent mes connaissances techniques."


*: la moitié susdite de ma famille planterait des épingles au curare dans une poupée à mon effigie en psalmodiant des sortilèges si elle avait connaissance de cet avis. De grâce, n'en dites rien.

Stock 2020, 530 p.