p.320:
"Le roman scientifique remonte, en ligne directe, aux Mille et Une Nuits, dont beaucoup des contes sont alchimiques, et au Cabinet des Fées. L'usage des baguettes des fées s'est seulement un peu vulgarisé, ou agrandi, et l'on ne brûle plus les sorciers: on les décore...
On a lu dans l'Histoire des Etats et Empire de la Lune et du Soleil, de Bergerac, la description, tout au long, du phonographe, et d'un curieux ballon..."
pp.321-322:
"Et c'est dans l'Histoire des Oiseaux, du même Cyrano, qu'est développée déjà cette théorie de quelques néo-darwiniens très modernes, que l'oiseau est plus avancé que l'homme dans l'évolution.
La lecture du roman scientifique, ce répertoire de l'irréalisé actuel, est exactement un voyage, vers l'avenir, dans La Machine à explorer le temps de H.G. Wells, le maître d'aujourd'hui, et de par les créations les plus imprévues, de cette littérature...
Parmi les précurseurs très récents de Wells, il faut citer, nous ne disons pas Villiers de l'Isle-Adam, dont l'extraordinaire Hadaly ne ressuscite-t-elle pas dans nos music-halls, sous le nom de l'auto-vierge ? mais l'auteur d'Ignis, resté anonyme jusqu'à la troisième édition, en 1884, où l'on apprit tout à coup que l'ouvrage était couronné par l'Académie française, et le nom du romancier, Didier de Chousy.
Le sujet d'Ignis, c'est la captation industrielle du feu central, projet dont un inventeur reparla lors de l'exposition de 1900. Mais ce qui est tout à fait remarquable dans Ignis, et prouve une fois de plus que les écrivains scientifiques sont des précurseurs, c'est le tableau de la révolte des machines devenues intelligentes, des hommes vapeurs, des atmophytes - l'automobile n'était pas inventée..."
(Apparemment, chez le comte Didier de Chousy, réédité en 2008, le monde décrit dans "Ignis" inclut des microphones indiscrets qui redisent tout ce qu'ils entendent, des cochers électriques, des bulletins de nouvelles sonores... pas mal en 1883)