Plus tard, assis devant le beau meuble, tandis qu'il caressait le dos et la couverture de cuir des prodigieux livres qui lui appartenaient désormais, Élías découvrit que plusieurs volumes semblaient plus usés par la manipulation fréquente à laquelle leur propriétaire avait dû les soumettre. Parmi les plus défraîchis, il y avait, bien entendu, deux des oeuvres de Maïmonide, le penseur favori de Benjamín Montalbo, et les "Dialoghi d'amore"* de Léon l'Hébreu, mais aussi plusieurs auteurs modernes, sans aucun rapport avec la foi ou la religion, comme ce Miguel de Cervantès, auteur d'un volumineux roman intitulé "L'ingénieux hidalgo Don Quichotte de La Manche" et un certain Inca Garcilaso de la Vega (également traducteur des "Dialoghi d'amore" en castillan), auteur de "La Florida del Inca"**, chronique des échecs des tentatives de conquête de ce territoire du Nouveau Monde où, disait-on, avait été découverte la Source de l'Éternelle Jouvence.
* "Dialogues d'amour" (1541), de Juda Abravanel, dit Léon l'Hébreu.
** "La Florida del Inca" (1605), Inca Garcilaso de la Vega. Édition française : "Histoire de la Floride", 1670.